Avez-vous déjà entendu parler du Kudzu (aussi orthographié « Kuzu») ? Le kudzu est une plante vivace, de la famille des fabacées qui pousse dans tout le Japon. Sa racine est utilisée au Japon en tant qu’ingrédient pour les gâteaux japonais traditionnels depuis l’époque Edo (1600-1867). Par exemple, le Kudzu mochi (« 葛餅 »), un grand classique des gâteaux traditionnels nippon. Son apparence lisse et transparente donne une impression de fraîcheur, ce qui fait de lui un dessert très apprécié pendant l’été. La texture du Kudzu mochi fait penser à un flan lisse, avec un goût naturellement doux. Généralement, on le mange en versant du kuromitsu (黒蜜 : « sirop de sucre noir ») ou en saupoudrant de kinako (きな粉 : « poudre de soja grillé») pour sucrer légèrement et naturellement le tout.
D’autre part, la racine du Kudzu est utilisée dans la médicine « Kampo » pour ses vertus thérapeutiques, notamment pour réguler la digestion et la transpiration. Le kakkontô (葛根湯 : « infusion de racine Kudzu ») est un médicament oriental fabriqué à partir de racine de kudzu réduit en poudre. C’est un des médicaments Kampo qu’on prend en début de rhume. Le Kudzu est donc une plante qui a le mérite d’être à la fois bon pour le palais et la santé !
*Notez que la poudre de Kudzu a une haute teneur en glucide. Faites donc attention au dosage.
Hon-kudzu(« 本葛« ) « vrai kudzu » : les étiquettes douteuses
Au Japon, il y a des produits de kudzu avec l’étiquette Hon-kudzu(本葛), littéralement « kudzu authentique » ou « vrai kudzu ». Cependant, cela n’empêche pas les marchands de couper leur Kudzu avec d’autres ingrédients comme de la fécule de maïs. D’autres mélangent avec du kudzu produit en Chine pour baisser le coût de revient. Sous la loi japonaise actuelle, il n’y a pas de critères précis pour l’appellation « hon-kudzu ». Ce qui perturbe donc les consommateurs japonais, qui ne savent pas à qui faire confiance. Fabriquer de la poudre 100% kudzu au Japon demande beaucoup d’efforts et de temps de travail. Il faut 100kg de racine pour produire 7 à 10 kilos de poudre pur. C’est pour ça que cette poudre est parfois appelée « l’or blanc » au Japon. Ce qui pousse donc les producteurs à profiter de l’ambiguïté des critères posés par la loi japonaise. Tous ? Non ! Quelque part dans la préfecture de Fukuoka se trouve un village du nom d’Akizuki qui résiste encore à la filouterie ! Nous sommes allés à la rencontre de l’un de ces irréductibles producteurs.
Takaki Kyusuke : marchand ancestral du kudzu naturel
Akizuki est une petite bourgade entourée par les montagnes, à environ deux heures en voiture depuis le centre-ville de Fukuoka. Ce hameau est célèbre pour ses sakura au printemps, et ses érables en automne. Des petites rivières coulent et fournissent une eau pure à des ateliers de papiers washi ou de teinture végétale. Depuis la fin de l’ère d’Edo, la maison de Takaki Kyusuke (fondée en 1819) continue de fabriquer des produits kudzu dans ce joli village. Les artisans de Takaki Kyusuke choisissent des racines de kudzu vieux de 30 ans à 50 ans poussant naturellement dans les montagnes de Kyushu. Bien qu’ayant mécanisé quelques parties de leur processus de production, ils fabriquent leurs produits en utilisant un savoir-faire traditionnel.
Takaki Kyusuke n’utilise aucun produits chimiques, et ne mélange pas son kudzu avec d’autres fécules ou avec du kudzu étranger. Certains producteurs utilisent de l’acide sulfurique pour neutraliser la chaux. D’autres utilisent des agents antimoussant, de blanchiment et d’autres chimique pour augmenter leur productivité. À l’opposé, chez Takaki Kyusuke, ils prennent le temps pour produire leur hon-kudzu, sans tricher, tout en gardant leur savoir-faire ancestral. Leur principe est de produire « une nourriture plus sûre, sans ajouts, avec un bon goût et un prix raisonnable ». Ils continuent à protéger leur principe, et le voient comme une évidence.
Entre tradition et modernité
Le Japon a fait l’expérience d’un miracle économique d’après-guerre. La société japonaise a beaucoup changé et pas mal de traditions disparurent pendant cette période. Le Japon n’aurait certainement pas bénéficié de ce boom s’il s’était accroché à ses traditions. Mais malgré ces tendances économiques, encore aujourd’hui, la maison de Takaki Kyusuke ne cesse de fabriquer le kudzu comme le veut la tradition.
Selon Takaki Kyusuke (10ème du nom) : « Auparavant, c’était normal de préserver les choses et coutumes anciennes. Mais après la guerre, la culture japonaise traditionnelle a été rejetée. Les gens comme nous étaient vus comme des ploucs. Nous, les japonais, avons détruit pas mal de maisons traditionnelles pour les remplacer avec des bâtiments modernisés. La préservation des traditions a aussi ses mauvais côtés, bien sûr ! Mais si on rejette d’un bloc toutes nos traditions, on finit par perdre notre âme, notre héritage. Par exemple, il y a des anciens villages qui, en agrandissant leurs routes, se sont défigurés pour accueillir plus de touristes.»
Pour ce qui est des produits alimentaires, Takaki-san pense que les pays européens font plus d’efforts que le gouvernement japonais pour préserver leur terroir, avec des labels comme l’AOC. Au milieu de sa boutique vieille de 260 ans, Takaki-san nous transmis cette parole, comme une mise en garde :
«Jusqu’à aujourd’hui, par un heureux hasard, plusieurs traditions ont échappés à l’extinction. Mais dès maintenant, il faut les préserver consciemment. »
*Si vous voulez savoir en plus, veuillez visiter la page blog ci-dessous écrit par Prairie Stuart-Wolff avec de très belles photos.
http://cultivateddays.co/article/a-singular-pursuit/

© Prairie Stuart-Wolff
SOURCES EXTERNES
« Takaki Kyusuke », http://www.kyusuke.co.jp/kuzu.html
« IN YOU – Journal for the macrobiotique », http://macrobiotic-daisuki.jp/kuzu-detox-yarikata-23302.html
« Wikipedia », « kuzuko », https://fr.wikipedia.org/wiki/Kuzuko
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